15 Janvier 2013 - 18h05 • 4064 vues

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A mesure que la tête de flotte approche du pot au noir, les poursuivants de François Gabart sont aux aguets pour déceler une éventuelle faille du skipper de MACIF. Dans des airs de plus en plus instables, avec une situation météo qui s’annonce complexe dans l’Atlantique Nord, les prétendants au podium révisent leurs ambitions à la hausse.

MACIF a franchi l’équateur géographique, mais le vrai juge de paix sera la frontière atmosphérique entre hémisphères nord et sud, le pot au noir. Dans son sillage, Armel le Cléac’h (Banque Populaire), après avoir subi légitimement un petit passage à vide, a recouvré du poil de la bête et entend bien rappeler qu’on ne vend pas la peau du chacal avant de l’avoir abattu. Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec 3), fort d’une vitesse retrouvée, se prend aussi à rêver bousculer la hiérarchie, quand Alex Thomson (Hugo Boss) se dit que le podium est toujours à sa portée.

Bien sûr, le pot au noir peut toujours fournir son lot de rebondissements, même si, pour l’heure, sa traversée ne semble pas poser de gros problèmes. Les masses nuageuses plombées capables de bloquer la machine à vent plusieurs durant semblent peu actives, mais on sait à quelle vitesse la situation peut évoluer. Mais c’est surtout la situation en Atlantique Nord qui réveille les espoirs du petit groupe à la poursuite de Mr Gabart. L’anticyclone des Açores et celui des Bermudes semblent en effet devoir fusionner d’ici deux à trois jours, formant une barrière anticyclonique, barrant toute possibilité de route directe vers les Sables d’Olonne. Rallier le port vendéen ne pourrait alors se faire qu’au prix d’un gigantesque détour par l’ouest, dans des airs plutôt mous. Dans ces conditions, des ouvertures peuvent se profiler pour les hommes à la poursuite du leader. Aujourd’hui les dernières simulations de routage pourraient donner la tête de course à 1000 milles de l’arrivée dans la journée du 24 janvier. Mais, on est sur des schémas à neuf jours dont la fiabilité n’est pas garantie.

Duels ouest – est au bord de la crise de nerfs

Derrière la bande des quatre, le peloton subit aussi les affres d’une météo particulièrement capricieuse. En cause, un col entre deux masses anticycloniques particulièrement compliqué à franchir. Jean Le Cam (SynerCiel) à la lutte avec Mike Golding (Gamesa) protège la gauche du plan d’eau, espérant tirer profit d’une petite dépression orageuse en cours de formation dans le sud du Brésil. Son concurrent britannique préfère tenter sa chance dans l’est pour être le premier à bénéficier de la courbure de l’anticyclone de Sainte-Hélène. Cette bagarre n’est évidemment pas sans rappeler le match à trois que s’étaient livrés Jean, Mike et Vincent Riou en 2005. A l’époque, Jean avait privilégié l’est du plan d’eau et avait dû céder le pas à Vincent Riou et même à son concurrent britannique, avant que Mike Golding ne connaisse une avarie de drisse de grand-voile. Ce n’est pas forcément le meilleur souvenir du skipper de SynerCiel et il ne serait pas étonnant que les enseignements de son premier Vendée Globe fassent aussi partie des paramètres d’analyse de Jean Le Cam.

Derrière eux, la lutte est tout aussi chaude entre Javier Sanso (ACCIONA 100% EcoPowered), parti dans l’est, Arnaud Boissières (AKENA Vérandas) et Dominique Wavre (Mirabaud), en position médiane. Comme le faisait remarquer le navigateur suisse, ce n’est pas par atavisme national qu’il a choisi une position neutre, mais plus parce que dans le doute, la route la plus directe apparaît souvent comme dictée au coin du bon sens. Reste que le premier à s’extraire des griffes de la dorsale qui les retient pourrait bien empocher la mise. Arnaud Boissières a fait le pari de la contourner par l’ouest en espérant compenser par sa vitesse le nombre de milles parcourus en plus. Dans ce genre de situation, les logiciels de routage n’en peuvent mais. Il faut accepter de faire confiance à son intuition pour choisir sa route. Mais c’est aussi le charme de la course océanique de montrer qu’elle laisse encore des zones d’ombre qui échappent à la stricte logique des programmes informatiques.

Pacifique solo

Alessandro Di Benedetto est maintenant le seul solitaire à naviguer dans le Pacifique. Le skipper de Team Plastique devrait rallier le cap Horn dans deux jours, malgré son avarie de drisse de gennaker qui le prive de cette voile d’avant si efficace au portant. Pour Bertrand de Broc (Votre Nom autour du Monde avec EDM Projets) et Tanguy de Lamotte (Initiatives-cœur), le Pacifique est derrière. L’un comme l’autre ont vécu avec intensité ce passage d’un monde à l’autre, même si l’on sentait chez Tanguy de Lamotte une émotion particulièrement forte de rentrer dans le cercle étroit des navigateurs solitaires cap-horniers. Savoir que l’on vient de rentrer dans une confrérie qui regroupe un peu plus d’une centaine de personnes, marcher sur les traces des matelots du temps des clippers et des trois-mâts barques, qui pouvaient parfois attendre des semaines avant de franchir le fameux cap, n’a rien d’anodin. La légende dit que tout cap-hornier acquiert le droit de pisser au vent. Peut-être est-ce une manière de signifier qu’accomplir ce périple, c’est aussi avoir su exorciser les peurs qu’inspirent les mers du sud.

PFB

 


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