27 Juillet 2015 - 10h12 • 3437 vues

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Officiellement préinscrit au Vendée Globe, Nicolas Boidevézi poursuit la prise en main de son 60 pieds IMOCA, l’ex Hugo Boss avec lequel Alex Thomson a terminé 3e du dernier Vendée Globe. En parallèle, le marin alsacien et son équipe recherchent des sponsors financiers majeurs pour participer au prochain tour du monde en solitaire et aux trois transatlantiques de préparation (Jacques Vabre, BtoB, New York-Les Sables d’Olonne). Skipper motivé et compétent, bateau performant, équipe structurée : tout est fin prêt pour activer un projet. Rencontre.

Nicolas, tu t’entraînes actuellement à bord de l’ancien Hugo Boss. Avec quels financements as-tu acquis ce plan Farr de 2007 ?
« Grâce à une personne de mon réseau, un investisseur, qui croit en moi et me suit depuis longtemps dans mes projets sportifs. Nous sommes partis du constat que le risque était grand d’avoir un budget mais pas de bateau disponible car il y a plus de demandes que d’offres. Acheter un 60 pieds permet au projet d’entrer dans une phase plus concrète. C’est aussi un plus en termes d’image. Le Vendée Globe est un immense challenge et beaucoup de gens pensaient qu’on n’y arriverait pas. Nous avons surpris du monde en achetant un bateau. Aujourd’hui, je suis crédible en tant que skipper IMOCA. »

Pourquoi as-tu opté pour ce 60 pieds IMOCA en particulier ?
« Car il est performant et déjà fiabilisé. On voit qu’il est passé entre de très bonnes mains : Sébastien Josse pour le Vendée Globe 2008/2009, Roland Jourdain qui a remporté la Route du Rhum 2010 à son bord, Alex Thomson pour le Vendée 2012/2013 et plus récemment Guillermo Altadill et José Munoz lors de la Barcelona World Race (2e place). Il Nicolas Boidevézi à bord de l'ancien Hugo Boss © Nicolas Boidevézis’agit de l’un des bateaux actuels qui affichent le meilleur palmarès. Les plans Farr sont des bateaux « faciles », sans superflu, efficient. C’est marrant car ma toute première navigation en IMOCA, en 2011, s’était justement faite à bord d’un plan Farr, l’ancien Akena Verandas (actuel Initiatives-Cœur de Tanguy de Lamotte, NDLR). Ce jour-là j’ai compris qu’un IMOCA était un bateau fait pour moi. Mon rêve de Vendée Globe est alors devenu possible. Je récupère une plateforme prête à régater, il suffit de mettre la clé dans le contact pour démarrer. C’est un aspect primordial car le temps est compté. La vente de l’ex Hugo Boss s’est conclue mi-avril. Le bateau sera officiellement livré fin août car Alex Thomson a un programme de relations publiques jusque-là. Mais en attendant, Alex a accepté de m’intégrer à son team pour commencer la prise en main et la passation. La collaboration se passe à merveille, il n’y a pas de rétention d’informations, au contraire. Alex et son équipe me transmettent ce qu’ils ont appris en douze ans sur le circuit IMOCA. J’ai déjà parcouru 2500 milles à bord entre Méditerranée, Irlande et Sud de l’Angleterre, dans des conditions très variées. Cette expérience me permet d’appréhender la navigation en IMOCA et tous les volets d’un projet Vendée Globe : performance, logistique, entretien, gestion des risques… Cette démarche est d’une efficacité redoutable. C’est une opportunité en or pour moi et mon équipe. Et ça me sort du bureau, des recherches de sponsors ! Je vais continuer à accumuler des milles puisqu’en août je participerai à la Cowes Week puis à l’Artemis Challenge, en tant que co-skipper officiel d’Alex Thomson. »
 
« Comme à la maison. »

Nicolas Boidevézi à bord de l'ancien Hugo Boss© Nicolas BoidevéziComment se passe la découverte d’un 60 pieds IMOCA quand on vient directement du Mini 6.50, un bateau trois fois plus petit ?

« Très bien, le feeling est excellent. Les Mini 6.50 prototypes sont sans doute les bateaux les plus proches des IMOCA. Mes années en Mini sont très bénéfiques, je suis bien armé pour prendre en main mon nouveau bateau. Au début, la taille des 60 pieds impressionne mais on s’y fait très vite. Je me suis tout de suite senti comme à la maison. Je retrouve des similitudes dans les sensations, la vie à bord, l’anticipation, la gestion du matériel, les réglages… Les premières navigations confirment que je n’ai pas à rougir de ne pas m’être arrêté au Figaro et au Class40. C’est un grand plaisir de voir défiler les milles avec facilité. Ca rapproche les continents. »

Tu évoques de nombreuses similitudes entre Mini et IMOCA. L’engagement physique est tout de même nettement plus important en 60 pieds…
« Oui, c’est LA grosse différence. Les efforts sur le bateau sont sans commune mesure. Il faut que j’aille me gonfler les épaules. Pour tout le reste, l’IMOCA est plus confortable et presque plus facile qu’un proto Mini 6.50. La vie à bord est meilleure et nous disposons d’éléments qui facilitent la vie du skipper, comme des outils informatiques précieux pour prendre la météo et établir la stratégie. »
 
En parallèle de ces navigations de prise en main, tu recherches de futurs partenaires pour t’accompagner sur un programme de sponsoring avec le Vendée Globe en ligne de mire…
« Oui j’ai monté une équipe qui gère l’aspect administratif et la recherche de sponsors. Cela me permet de dégager du temps pour naviguer et donc d’avancer sur le plan sportif et technique. Je suis en mesure de proposer un projet clé en main prêt à être activé, avec un bateau fiable et performant. J’ai énormément démarché ces dernières années pour rendre le terreau fertile. L’achat du bateau a été une belle récompense. Il faut désormais un ou plusieurs partenaires pour que le projet continue à sortir de terre ! »

« Le nom de course reste disponible. »

Concrètement, où en sont tes recherches ?

« Nous n’avons à ce jour pas sécurisé le budget de fonctionnement du projet pour un programme Vendée Globe avec au préalable des participations à la Transat Jacques Vabre, la Transat BtoB et la New York-Les Sables d’Olonne. Je n’ai pas de partenaire financier majeur. Le nom de course reste disponible. Mais nous sommes dans une dynamique positive. Je ressens un vrai élan autour du projet. Il suscite de l’enthousiasme et de l’engouement auprès du public et des partenaires. Les gens adhèrent et se fédèrent autour de notre projet. Des sponsors secondaires ainsi que des partenaires techniques et des fournisseurs sont déjà engagés. Nous sommes en discussions avancées avec des collectivités territoriales et des sociétés privées. J’ai surmonté beaucoup de difficultés pour en arriver là et je ne vais certainement pas me décourager même si la recherche de sponsors est difficile… »
 
Que souhaites-tu dire aux entreprises potentiellement intéressées ?
« Qu’il faut démarrer l’histoire dès maintenant car s’inscrire dans le long terme est plus qualitatif en termes de retombées, de communication. Le Vendée Globe est un investissement gagnant, tous les sponsors s’y retrouvent. Mon boulot, mais aussi celui de la classe et des organisateurs du Vendée Globe, est de le faire savoir. Je suis conscient qu’il peut paraître plus risqué de miser sur un jeune comme moi que sur un skipper très expérimenté ayant déjà plusieurs participations au Vendée Globe à son actif. Mais je peux apporter une plus-value. Je mettrai par exemple en place des outils innovants en termes de multimédia et d’images. »
 
« Une route de montagne. »

Nicolas Boidevézi à bord de l'ancien Hugo Boss© Nicolas BoidevéziLa Transat Jacques Vabre approche. As-tu bon espoir de pouvoir t’aligner au départ ?

« Oui, on ne peut pas rater cet événement ! Disposer d’un bateau et ne pas être au départ serait vraiment dommage. A un an du Vendée Globe, nous avons besoin de nous situer par rapport à la concurrence. La Jacques Vabre serait aussi l’occasion de commencer à faire parler du projet, des partenaires. Si j’ai le budget, je partirai avec un skipper anglo-saxon talentueux. Nous serons un équipage 100 % bilingue tourné vers l’international. »

Tu as officialisé ta préinscription au Vendée Globe 2016/2017. Il s’agissait d’une étape importante ?
« Oui. Nous avons un bateau, un skipper, une équipe : il est donc logique de se préinscrire. De plus, il n’y aura que 27 places pour le prochain Vendée Globe et peut-être davantage de candidats. La route est encore longue pour être au départ, et c’est une route de montagne ! La prochaine étape sera la qualification. »
 
Dans quelle optique prendras-tu le départ de ton premier Vendée Globe ?
« La première victoire sera d’être au départ, la seconde sera d’arriver. Après, je ne cache pas que j’ai une âme de compétiteur. Je donnerai tout pour faire la plus belle course possible. Mon bateau me le permettra. En attendant j’ai hâte de tirer mes premiers bords en solitaire en IMOCA, ça me manque beaucoup… »

Propos recueillis par Olivier Bourbon / agence Mer & Média


Nicolas Boidevézi présente son projet pour le Vendée Globe 2016 par VendeeGlobeTV