« Qu’est-ce que tu fais pour les vacances ? Moi je n’ai pas changé d’adresse ». La voix calme d’Alexia Barrier laisse entrevoir un sourire. La navigatrice, qui avait bouclé son Vendée Globe en 111 jours, fait partie des marins qui nous ont répondu pour notre deuxième volet sur l’été des skippers, entre navigation, recherche de partenaires et quelques jours de détente.
Couper pour souffler, enfin, couper pour respirer, ne plus avoir peur de laisser le temps filer, profiter de ses proches et se laisser bercer par la quiétude du moment. C’est le temps des vacances d’été et les skippers du Vendée Globe de retour sur terre depuis une poignée de mois le savent autant que quiconque. Pourtant, difficile d’avoir la tête à 100% aux vacances quand les échéances à venir sont nombreuses, quand le compte-à-rebours pour la prochaine édition est déjà lancé et que plusieurs courses marqueront cette deuxième partie de la saison. Il n’empêche, des tendances se dessinent et les marins que nous avons interviewés semblent davantage aoûtiens que juilletistes.
« J’ai le nez dans le guidon, comme toujours » (Pip Hare)
En juillet, « l’activité est très intense », explique d’ailleurs Stéphane Le Diraison. Le skipper s’est lancé dans « un projet ambitieux pour le Vendée Globe 2024 avec un bateau neuf qui soit à la fois performant au niveau sportif et environnemental ». Alors qu’il dévoilera à l’automne les détails de sa démarche, ses dernières semaines ont été accaparées par « les discussions avec les partenaires, avec les architectes » tout en effectuant quelques sorties en mer pour « remercier ceux qui m’ont aidé à faire le dernier Vendée Globe ».
Pip Hare ne chôme pas non plus cet été. « Je vais essayer de mettre mon bateau à l’eau fin juillet et le ramener à Poole (dans le Dorset, au sud de l’Angleterre). Ensuite, je vais apprendre à naviguer avec en août et en décembre ». La Britannique assure « vouloir prendre des vacances » mais elle a « le nez dans le guidon, comme toujours ».
Fabrice Amedeo s’est également activé ces dernières semaines. Son bateau a été mis en chantier après un incident début juillet. En parallèle, il a entamé un tour de France pour réaliser des relevés de microplastiques afin de les mettre à disposition de la communauté scientifique. Et dans le même temps, alors qu’il a annoncé faire équipe avec le jeune Loïs Berrehar sur la Transat Jacques Vabre, il s’affaire sur le « recrutement du reste de l’équipe » en vue de son prochain tour du monde…
En pleine préparation de la Rolex Fastnet Race
Pour Sam Davies aussi, juillet a été studieux. Certes, la navigatrice britannique a parcouru une étape du Tour de France à l’initiative de Mécénat Chirurgie Cardiaque aux côtés de Maxime Sorel à Laval. Mais désormais, elle prépare activement la Rolex Fastnet Race avec Nicolas Lunven. « On a fait nos premières navigations ensemble. C’est un peu court comme préparation – la course s’élance le 9 août prochain – mais on avance ! »
Alexia Barrier disputera également la Rolex Fastnet Race avec Manuel Cousin, avec qui elle est associée jusqu’à la fin de l’année. Et pour ce duo, le temps est également compté. « Le bateau est en chantier chez Mer Agitée et on l’aura assez tard, ce qui sera court pour assurer la préparation ». Mais la navigatrice est prête, elle qui a repris la préparation physique depuis un mois et demi. « Je fais pas mal de vélo dans mon joli département, entre mer et montagne ».
« Pas évident de couper sans avoir de certitudes pour l’avenir » (Roura)
Dans le même temps, Alexia a repris la mer à bord de son IMOCA avec lequel elle a réalisé son tour du monde. En effet, elle propose des éco-travel entre le continent et la Corse à ceux « qui ne veulent prendre ni l’avion, ni le ferry ». « C’est chouette de développer ça, de lancer cette activité et d’assurer en douceur la retraite de mon ‘Pingouin’ »
Mais pour Alexia, il n’y a pas vraiment de place pour le farniente. « Je ne pars pas en vacances mais j’essaie de me reposer et de passer du temps en famille ». Et elle s’amuse : « qu’est-ce que tu fais pour les vacances ? Moi je n’ai pas changé d’adresse et tout va bien à bord ! ». Elle en profite également pour chercher des partenaires pour son nouveau tour du monde, son sponsor-titre n’ayant pas poursuivi l’aventure.
Alan Roura, lui aussi, est en recherche active de sponsor alors que La Fabrique a décidé d’arrêter l’aventure. « C’est une situation assez complexe et l’emploi du temps est assez chargé entre la prospection et la gestion de l’entreprise », raconte-t-il. Le Suisse, qui multiplie les allers-retours dans son pays, reconnaît qu’il « n’est pas évident de partir en vacances et de couper sans avoir plus de certitudes sur l’avenir ». Il n’empêche, Alan Roura est parti quelques jours en famille à Annecy. Il a aussi prévu de se rendre en Grèce en septembre avec un couple d’amis. « Ça va me faire du bien de quitter un peu la France et c’est important, surtout, de prendre du temps libre ».
© /Ari HUUSELA : STARKPour Ari Huusela, dernier à avoir franchi la ligne d’arrivée en mars dernier, l’été se conjugue d’abord avec le travail. Le Finlandais a repris son quotidien de pilote de ligne pour la compagnie nationale Finnair. « Après un an de pause, il a bénéficié d’une formation de plusieurs semaines en juin avant d’effectuer son premier vol », explique Nina, sa partenaire, attachée de presse pendant l’aventure Vendée Globe. Ari a notamment eu l’honneur de piloter l’A350 emprunté par la délégation d’athlètes finlandais qui se rendaient aux Jeux Olympiques. En plus de ces vols, Ari s’offre quelques moments de détente. Il a ainsi navigué pour la première fois depuis la fin du Vendée Globe en cette fin de semaine. Nina explique également qu’il a pu « profiter de la nature sauvage et de la quiétude de la Laponie » lors de sorties à vélo et de randonnés.
« Une vraie coupure de quatre semaines » (Stéphane Le Diraison)
Fabrice Amedeo a lui aussi l’intention de faire une pause. Ce sera la première quinzaine d’août et ce sera sur l’eau. « Mon oncle paternel me prête son bateau. Nous partirons en famille depuis Collioure. On ira soit en Corse ou aux Baléares : on improvisera au dernier moment ». Quand Fabrice rentrera de vacances, Sam Davies a elle prévu de faire relâche « la deuxième partie du mois d’août ». La navigatrice d’Initiatives Cœur qui « n’a jamais pris plus de cinq jours ‘off’ depuis la fin du Vendée Globe » souhaite « faire une pause en famille ». « On ne va pas aller loin, on va rester dans notre super Bretagne et passer du temps sur l’eau et sur les plages », s’amuse-t-elle.
La famille, les enfants et le clapotis de l’eau. Ce sera aussi au programme de Stéphane Le Diraison qui met le cap sur la Méditerranée. « Je m’étais promis de m’offrir une vraie coupure, quatre semaines pleines sans mon téléphone, à ne plus regarder ma boîte mail, et partir en croisière avec les enfants. On va prendre le temps d’apprécier la côte, on va dormir plus que par session de 20 minutes et ça va nous permettre de repartir pour l’automne en pleine forme ! »
Destremau, Nouméa et Sydney-Hobart
À plus de 17 000 km de là, Sébastien Destremau est en Nouvelle-Calédonie. Confiné à l’hôtel en quatorzaine début juillet, son programme se veut studieux. « Je vais faire des conférences et préparer une pièce de théâtre qu’on va jouer le 10 septembre à Nouméa. De plus, je vais sur l’île Lifou pour faire des stages avec de jeunes régatiers ». En parallèle, il prépare son IMOCA, Merci, afin de disputer la Sydney-Hobart en décembre prochain. En 1998, il avait déjà participé à cette course de légende. « C’est la grande classique de l’hémisphère sud » confie-t-il. Ensuite, le bateau rentrera en France et Sébastien, comme nombre de skippers, aspire à participer à la Route du Rhum, à l’automne 2022.
Par la rédac du Vendée Globe / Antoine Grenapin