Bernard Bonneau, président du jury international du Vendée Globe revient sur les procédures spécifiques de réclamation sur ce tour du monde pas comme les autres.
Pourquoi existe-t-il des réclamations en voile et qui peut réclamer ?
Il faut d’abord rappeler qu’une réclamation n’a rien d’un acte antisportif, au contraire. C’est même le seul geste de régulation dans un sport où l’auto arbitrage est la règle. On n’est pas sur un terrain clos, il est impossible de mettre un arbitre derrière chaque bateau, comme on peut le faire maintenant en match-racing. C’est donc aux concurrents de faire respecter la règle, en premier lieu. Ensuite, le comité de course, voire le jury lui-même, peuvent réclamer s’ils constatent une infraction ou un manquement aux règles. Rappelons enfin, qu’une réclamation n’est jamais que l’allégation qu ‘une règle a été enfreinte par un concurrent.
Une fois qu’une réclamation a été posée, comment se déroule processus d’instruction ?
Sur le Vendée Globe, on a choisi, pour plus de clarté, d’instruire les réclamations au fur et à mesure qu’elles nous parviennent. Les e-mails sont donc notre vecteur de communication premier. Quand un concurrent réclame, il envoie un mail à la direction de course qui nous le transmet. Nous sommes un jury international comprenant un Néo-Zélandais, un Espagnol, un Britannique et deux Français. La réclamation est transmise aux cinq membres du jury ainsi qu’à l’ensemble des parties concernées. Cette procédure-là prend déjà une à deux journées, le temps de vérifier que tout le monde est au courant de la procédure engagée.
Vient ensuite, le temps de l’instruction : chaque partie peut contribuer au débat, amener des éléments pour sa défense ou pour justifier sa réclamation. Ce débat contradictoire se déroule par e-mail en passant systématiquement par l’intermédiaire du jury. Compte tenu des conditions météorologiques rencontrées par la flotte, cette phase a duré trois ou quatre jours, considérant que les navigateurs avaient aussi d’autres choses à faire que de rester de longues minutes à pianoter sur leur ordinateur. Le jury fixe une dead line variable en fonction des conditions météo. AU delà de cette date, les échanges sont interrompus.
Ensuite, le jury doit statuer : premier temps, établir la réalité des faits, qui a fait quoi. Deuxième temps, en fonction des faits établis, évaluer si une règle a été enfreinte. Enfin, si l’infraction est constatée, définir la pénalité en fonction de la gravité de celle-ci.
Enfin, pourquoi demander aux solitaires de réparer leur faute sur l’eau ?
Pour une question de lisibilité pour le grand public avant tout. Imaginons le cas de figure suivant ; un concurrent qui s’est vu infliger une pénalité de deux heures arrive en tête aux Sables d’Olonne, mais son second arrive une heure plus tard. Allez expliquer au grand public, dans l’excitation de l’événement, qu’en réalité, le premier, c’est celui qui est arrivé deuxième. Ici, la pénalité est effectuée sur l’eau et les comptes sont ensuite soldés. C’est au final, beaucoup plus simple.