27 Janvier 2013 - 15h50 • 3231 vues

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Dimanche 27 janvier 2013, François Gabart a remporté pour la première fois de sa carrière le Vendée Globe, tour du monde en solitaire, sans escale et sans assistance. Désormais plus jeune vainqueur de l'épreuve (29 ans), le skipper français a narré son aventure lors des live tout au long des 78 jours de course. Florilège.

12/11/12
Très satisfait, on ne pouvait pas imaginer mieux pour commencer le Vendée Globe. Ce n’est pas le plus important le départ mais c’est bien de commencer comme ça. On a encore du vent, ça glisse bien, on est au portant. Ça va assez vite, grand soleil, conditions plaisantes, pas mal de vagues. Je ne sais pas ce que va donner la suite mais je pourrai dire qu’une fois dans ma vie, j’ai été en tête du Vendée Globe.

15/11/12
Depuis le départ de la course, et je continue à le dire, que je sois en tête ou 10eme, ça ne change pas grand chose à la façon dont je gère le bateau. J’essaye de rester le plus neutre par rapport à la situation et par rapport au classement parce que je pense que ça n’a pas beaucoup d’importance. C’est super d’être en tête du Vendée Globe et je ne vais pas bouder mon plaisir.

19/11/12
Ça va très bien. On est en plein dans le pot au noir. Avec Jean-Pierre Dick on est côte à côte, on a eu notre premier grain et là c’est la pétole depuis 15 minutes mais c’est comme ça. Ce matin, le lever du jour était vraiment magique. Grosse pluie diluvienne, il faisait encore nuit puis le soleil s’est levé pendant qu’il y avait un grain. Je garde un œil sur Jean-Pierre Dick. Je crois qu’on cherche tous les deux une opportunité pour s’échapper. Si j’ai une opportunité de le laisser sur place, je n’attendrai pas. Il n’y a pas de grande stratégie à avoir. On a juste à aller vers le sud en espérant avoir de la chance.

24/11/12
Il y a forcément une grosse envie d’aller dans les mers du Sud pour voir ce que c’est. Je suis ravi d’être là. Je veux les vivre mais il faudra aussi de la prudence, car je sais que ce sont des navigations dangereuses. Je ne prendrai pas de risques inutiles, je ferai attention.

25/11/12
(Sur l’abandon de Riou) J’ai découvert l’abandon tout à l’heure, c’est triste et malheureux. Il faisait partie des favoris et il aurait amené plein de choses jusqu’à la fin de la course. J’ai vu les dégâts et c’est vrai que c’est toujours difficile d’aller dans les mers du Sud si le bateau n’est pas à 100%. C’est dur car c’est un concurrent que j’apprécie beaucoup.

02/12/12
Je suis très content du classement de ce matin. Bien que ce soit anecdotique, ça fait toujours plaisir d’être devant. C’est une chouette compète avec Banque Populaire et Virbac-Paprec 3 ! Il y a un peu d’excitation avant d’entrer dans les mers du Sud. Je crois avoir vu mes premiers albatros, ça me fait très plaisir. C’est la première fois que j’entre dans ces mers, c’est la découverte à partir de maintenant.

11/12/12
Je ne dis pas que la course est facile, loin de là. Rien n’est facile. Le Vendée Globe est l’une des courses les plus difficiles au monde. On en bave, on a des problèmes, mais il y a aussi des moments sympas.

13/12/12
Ça va pas mal. L’océan Indien est assez compliqué depuis hier soir. On a une mer assez chaotique pour ne pas dire de gros mots, ce qui fait qu’on a du mal à avoir des vitesses assez élevées tout le temps. Il y aura beaucoup de tournants dans la course mais là, c’en est un, c’est clair. La météo est très favorable pour Armel (Le Cléac’h) et moi. Je suis évidemment content d’être devant à ce moment de la course. J’espère que la course va continuer comme ça. Je suis content du début de course, je suis très fier du travail qu’on a fait avec le bateau. On est dans un rythme pour lequel on s’est entrainé. On n’est pas en surrégime. Je suis content de tenir ce rythme-là et j’espère le tenir le plus longtemps possible. (A propos des records) J’ai un peu de mal avec les records de temps de course, dans le sens où on ne fait pas les mêmes parcours. Les portes changent la donne. C’est complètement inutile de comparer les temps de course, je ne m’intéresse pas à ça, je m’en moque. Ça n’a aucun intérêt.

17/12/12
On s’échange quelques mails avec Armel. Ça fait quelques heures, voire une journée, qu’on ne s’est pas envoyé quoi que ce soit. On ne s’est pas non plus envoyé des romans, c’est difficile de taper sur le clavier. On est allé à l’essentiel.

18/12/12
(Apprenant qu’il vient d’entrer dans le Pacifique) Waouhhhh ! Je suis dans le Pacifique, c’est une belle nouvelle ça. Je suis ravi même si je n’ai pas vu de grosses différences entre les deux (Indien et Pacifique). C’est parfait, il ne reste plus que cet océan, le cap Horn et hop ! direction la maison. Ça me va comme programme.

19/12/12
Ça me fait plaisir d’avoir fait la moitié et d’être sur le chemin du retour. On va essayer de faire aussi bien voire mieux sur la deuxième partie. Je suis super content d’être sur l’eau, de vivre ce que je vis. Ce n’est pas facile tous les jours mais j’essaye d’en profiter car ce sont des moments exceptionnels.

21/12/12
J’aperçois Armel, pas en permanence, mais vu qu’il est à 5 milles de moi, je vois souvent son bateau. C’est assez génial, d’ailleurs. Mais nous ne sommes pas non plus en configuration régate, je n’adapte pas mes décisions, mes manœuvres et ma navigation à ce que je le vois faire, j’ai ma course à courir.  

23/12/12
(A propos de la tête de course) Une fois l’un, une fois l’autre, c’est marrant. Ça fait plus de 15 jours qu’on est côte à côte. Je ne sais pas si ça va durer jusqu’aux Sables mais ça serait sympa de finir à quelques milles près. On est à la moitié d’un tour du monde. Il reste 40 jours. Des moments où les bateaux peuvent se séparer, il y en a un paquet. Peut-être qu’il y aura 1000 milles d’écart pour l’un ou l’autre à l’arrivée.

25/12/12
Je suis convaincu que les portes amènent plus de situations tactiques qu’autre chose. Là, il y a une dépression qui arrive et qui peut créer des décisions tactiques différentes. Ça va être intéressant.

28/12/12
Je ne sais pas si c’est rassurant d’être à côté d'Armel au Horn. Je pense que c’est plus rassurant d’être devant avec 200 milles d’avance, mais ça va être sympa. Maintenant, si on peut faire une différence à n’importe quel moment au niveau de la stratégie, on ne va pas se priver. (A propos du cap Horn) J’y pense déjà. C’est assez rigolo. Je suis allé faire un petit tour sur la carte pour le cap Horn pour voir comment ça se présentait, je me suis un peu renseigné sur les lieux. J’y pense, car ce n’est pas dans si longtemps que ça. C’est une belle récompense, ça fait partie des endroits symboliques et je pense que ça sera un super moment de navigation.

02/01/13
Ça va super, je suis content d’être arrivé dans l’Atlantique après avoir passé le cap Horn. C’est symbolique mais je suis très content de l’avoir passé en tête, ce n’est que du bonheur. La première fois ça fait forcément quelque chose, j’espère que les prochaines seront toujours aussi fortes. On vit de bons moments dans les mers du Sud, mais on en passe aussi des difficiles. C’est une bonne chose quand ça s’arrête.

04/01/13
(Sur sa stratégie) Pour moi, c’est à la fois clair et en permanence remis en cause. J’ai mon chemin stratégique en tête mais à chaque fichier météo, j’ai de nouvelles informations. Dans la philosophie générale, j’ai ma trajectoire qui est bien calée. (Sur sa position par rapport à Armel) Ça fait longtemps qu’on n’a pas été aussi éloigné. Je suppose qu’il y a des stratégies différentes. Armel est un peu plus proche de la route directe. Il veut se laisser le plus de cartes possibles entre les mains.

06/01/13
(Sur la stratégie d’Armel) Je sais quelle route j’ai choisie mais je ne connais pas celle d’Armel. Je pense que nos routes vont converger dans 3-4 jours. Il n’y a pas d’ambigüité dans nos routages, mais les fichiers météo ne sont pas excellents donc il faut prendre pas mal de précautions quant à la précision sur plusieurs jours.

12/01/13
Niveau tactique, je suis dans le même fonctionnement depuis le début. J’essaye de prendre la trajectoire la plus rapide jusqu’aux Sables. Ça fait 3-4 jours maintenant que les choix sont faits, dorénavant c’est plus une question de vitesse que de stratégie. Les dés ont été jetés, il n’y a plus grand-chose à faire à part essayer d’aller le plus vite possible. Depuis le début, j’essaye de naviguer à mon rythme. Je pense avoir gardé plus ou moins le même depuis le golfe de Gascogne à l’aller. Même en approche de l’arrivée, je ne vais prendre aucun risque inconsidéré, à me fatiguer inutilement. Je ne l’ai pas fait avant non plus ; donc, ça ne changera rien. Peut-être que j’accélèrerai dans les derniers « 100 mètres », mais pour l’instant je garde le même rythme depuis le début.

18/01/13
(Sur l’état de forme) Le bonhomme et le bateau sont en pleine forme, c’est une bonne nouvelle. J’ai pu profiter des conditions très faibles dans le pot au noir pour faire un check-up complet. Personnellement, malgré les conditions difficiles, je me suis reposé et je suis frais. Désormais c’est la fin de la course, on va chercher l’énergie au plus profond de soi et pour tenir jusqu’à l’arrivée. (Sur la fin de course et son parcours) La course va être difficile jusqu’au bout. Armel (Le Cléac’h) n’est pas très loin et il y a encore beaucoup d’obstacles jusqu’à la ligne d’arrivée. En revanche, on ne reviendra pas sur ce qui s’est déjà passé et je suis très fier de mon parcours. Personne ne pourra me le retirer et je pense que quoiqu’il arrive, ça restera un joli Vendée Globe pour moi. J’espère que ce sera un joli Vendée Globe jusqu’à la fin.

23/01/13
(A propos de sa position) Je suis content d’être là où je suis, le vent est en train de re-rentrer pour moi. Je pense que je suis du bon côté de l’anticyclone. Je fais route le plus rapidement possible vers la France. Je vais naviguer prudemment, ne pas forcer outre mesure et ne pas aller naviguer au-delà de ce que je sais faire. Mais si Armel avait été 10 milles devant moi, je n’aurais pas tenu ce discours et je pense que j’aurais été plus agressif. (A propos de son jour et de son heure d’arrivée) Je pense arriver ce week-end aux Sables, à priori avant le front froid assez violent de dimanche. Je pense arriver samedi en fin de journée ou début de nuit. Samedi matin, ça me parait un peu compliqué si on regarde la situation météo mais si c’est possible, avec plaisir.