Franck Cammas : « Le Vendée Globe est devenu une véritable Solitaire du Figaro planétaire »

Un nouveau défi en ligne de mire

Dans sa carrière riche et variée, le Vendée Globe reste une épreuve inexplorée. Désormais, l’évolution des IMOCA et le niveau de la classe l’attirent plus que jamais : une course qui conjugue exigence sportive et développement technologique, deux moteurs au cœur de sa démarche depuis toujours. « Ce n’est pas tant le voyage qui me séduit que l’intensité de l’exercice. De nombreux bateaux sont capables de jouer la victoire, les vitesses sont proches, la régate est permanente. À mes yeux, c’est devenu une véritable Solitaire du Figaro planétaire », souligne-t-il. Ces dernières années, il a privilégié les projets collectifs, mais il s’intéresse à présent davantage à la dimension solo sur ces monocoques de 60 pieds. Pour lui, la difficulté ne réside pas seulement dans l’endurance du marin, mais aussi dans la capacité à exploiter ces machines volantes au maximum de leur potentiel.
 

Des machines fascinantes

Ce qui séduit particulièrement Franck, c’est la complexité des IMOCA d’aujourd’hui. « Ce sont des bateaux très difficiles et instables, en grande partie à cause des foils et de la jauge, qui limite certaines solutions de stabilité. On n’est plus dans un monde archimédien comme auparavant. Tout se joue sur des équilibres dynamiques et des vitesses qui transforment complètement la manière de naviguer. » De telles caractéristiques imposent de nouveaux défis : vivre à bord dans des conditions extrêmes, supporter les chocs, réussir à manœuvrer seul tout en gardant le bateau proche de son rendement optimal. « Donner à un Homme la possibilité de rester 70 jours sur ces machines, en exploitant 90 % de leur potentiel, c’est un véritable casse-tête technique », reconnaît-il. C’est précisément cette complexité qui l’attire, dans chaque détail : la forme de coque, l’efficacité des foils, l’ergonomie du cockpit, la gestion de l’énergie. 

Cette curiosité technique s’appuie sur un vécu solide. Sur les monocoques de 60 pieds, il a d’abord collaboré avec l’équipe Charal aux côtés de Jérémie Beyou, avant de remporter en 2023 The Ocean Race avec 11th Hour Racing Team. Une trajectoire prolongée jusqu’à aujourd’hui, avec la conclusion de The Ocean Race Europe sur Holcim-PRB.

Un savoir-faire forgé par la mer et un palmarès hors normes

Cette diversité d’expériences forme le socle de son ambition de s’aligner un jour sur le Vendée Globe. Elle se construit au fil d’un chemin jalonné de succès, qui débute en 1997 lorsqu’il remporte la Solitaire du Figaro à seulement 24 ans. Ce premier exploit ouvre la voie à une longue histoire avec Groupama, dont il devient le skipper l’année suivante. Il occupe ce rôle pendant de nombreuses années et s’impose rapidement comme l’un des maîtres de la classe ORMA, multipliant victoires et records. Avec ces multicoques, il s’illustre notamment sur la Route du Café, qu’il remporte à quatre reprises (2001, 2003, 2007 et 2021). En 2010, il franchit une nouvelle étape en triomphant sur la Route du Rhum, avant de battre plusieurs records au large et de décrocher une consécration internationale en remportant la Volvo Ocean Race 2011-2012. « J’ai eu la chance de naviguer sur beaucoup de supports différents. Chaque expérience m’a apporté des clés », raconte-t-il, convaincu, à juste titre, que cette richesse constitue aujourd’hui un atout majeur pour évoluer en IMOCA et, demain, se donner les moyens de s’aligner sur le Vendée Globe, avec l’objectif de s’y imposer.

Une vision tournée vers demain

Ce projet personnel n’empêche pas Franck Cammas de regarder plus loin que sa propre trajectoire. Toujours en quête de nouveaux horizons, il ne se contente pas de naviguer. Responsable du design du Défi Français pour l’America’s Cup, il travaille au plus près des architectes et des ingénieurs sur les appendices, la coque, les systèmes de contrôle. « La voile de haut niveau progresse par transferts et croisements. » En 2025, il a également lancé Sailing Generation, une structure destinée à offrir aux jeunes talents l’opportunité de se former sur les supports les plus exigeants, des IMOCA aux séries olympiques. Une manière de transmettre son savoir, tout en gardant en ligne de mire son propre défi. Car si son projet Vendée Globe reste encore à bâtir, il incarne déjà ce qui fait la marque Cammas : exigence, innovation et volonté de repousser les limites.